La Guérilla des animaux / Camille Brunel

Isaac a un seul et unique postulat : l’Homme est mauvais car il tue des animaux. Obsédé par son combat et déterminé à imposer le véganisme à ses semblables, le jeune protagoniste se lance dans une chasse à l’homme destructeur tout autour du monde. Et il ne fait pas dans la dentelle ! Armé et sans pitié, le justicier détruit tout ennemi sur son passage. Braconniers en jungle indienne, baleiniers sur la Pacifique, tueurs de yacks au Kirghizistan…tout le monde y passe. Yumiko, une jeune femme le rejoint dans son aventure pour poursuivre le grand nettoyage…

Camille Brunel présente un premier roman intense et en phase avec son époque en poussant le militantisme à l’extrême. Il n’est pas nécessaire d’être soi-même défenseur de la cause animale ou adepte du régime végan pour apprécier ce livre qui, non seulement propose une réflexion intense sur le genre humain et le pouvoir qu’il exerce sur la nature, mais aborde également le thème de la mort avec finesse. Aucune question n’est explicitement posée, néanmoins, tout au long de sa lecture, on ne peut que s’interroger sur les thèmes traités dans ce livre. Est-il juste d’assassiner son prochain sous prétexte qu’il est un danger pour la planète et la biodiversité ? Militer pour une cause revient-il à mépriser ceux qui la désapprouvent ? Respecter la nature est-il plus important que tout ?

Bref, ce roman est une belle découverte et ne laisse pas indifférent.

Deux milliards de battements de coeur / Genki Kawamura

Alors qu’il ne lui reste que quelques jours à vivre à cause d’une maladie incurable, le jeune narrateur (30 ans) rencontre le Diable en personne. Ce dernier lui propose alors un marché. Il pourra bénéficier d’un jour de vie supplémentaire à condition d’effacer quelque chose sur Terre en contrepartie.

Mais tout mesquin qu’il est, le Diable impose peu à peu ses règles et le narrateur est vite confronté à des choix cruels. C’est avec ses souvenirs les plus heureux qu’il va parvenir à faire les bons choix…

Ce roman est très attendrissant et propose un regard philosophique sur le sens de la vie, le bonheur et la beauté. Le thème de la mort est aussi omniprésent dans ce livre sans pour autant tomber dans le tragique. J’ai été touché par les récits du narrateur empreints de nostalgie et d’amour. L’écriture de  Genki Kawamura est saisissante, authentique et douce. Deux milliards de battements de coeur fut une délicieuse lecture.

 

Les nouvelles aventures du fakir au pays d’Ikea / Romain Puertolas

Si vous avez aimé L’extraordinaire aventure du fakir qui était resté coincé dans une armoire Ikea, vous ne serez pas déçu avec ce deuxième tome !

Dans cette suite, notre héros franco-indien se lance un challenge afin de renouer avec son esprit d’aventurier et redevenir l’homme qui a séduit la femme de sa vie, en allant en Suède chercher le dernier modèle de lit à clou … Bien entendu, son voyage va être perturbé par des rencontres inopportunes et des rebondissements saugrenus que je ne dévoilerai pas.

Avec un sens de l’humour dont lui seul a le secret, Romain Puertolas réussit le difficile pari de proposer une suite aussi efficace que son premier best-seller. Entre récit d’aventure et roman loufoque , Les nouvelles aventures du fakir au pays d’Ikea est une lecture idéale pour se changer les idées cet été.

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Et si l’amour c’était aimer ? / Fabcaro

J’ai découvert Fabcaro avec Zaï zaï zaï zaï , roman graphique décalé mêlant aventure et humour. Avec Et si l’amour c’était aimer, l’auteur démontre à nouveau sa parfaite maîtrise du second degré. Cette BD est une caricature des feuilletons à l’eau de rose (On pense notamment aux feux de l’amour et à Santa Barbara) dans laquelle Fabcaro rit des relations de couple et de l’amour en général. Il s’agit de Sandrine et Thierry, un couple bien installé, qui est perturbé par l’arrivée de Michel, un beau et séduisant livreur de macédoine (si, si !).

Tous les ingrédients de la parodie sont là : décalage entre le dialogue et le dessin, des personnages beaux, bien coiffés et bien habillés, des situations saugrenues. Parfois, j’ai pensé à certains sketchs des Inconnus ou de Kad et Olivier. J’ai très souvent pouffé de rire tellement tout est absurde. J’en redemande !

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Je t’apprends le français, bordel ! / Sylvain Szewczyk

Attention, fous rires garantis !

En parcourant la toile et en piochant le plus souvent dans les réseaux sociaux, Sylvain Szewczyk a établi un condensé des erreurs de français parfois courantes mais pour la plupart énormes. Avec un sens de la répartie hors norme, l’auteur s’est amusé à répondre aux fautifs avec des commentaires ironiques et pertinents. Le résultat donne un livre richement humoristique et subtilement didactique car parallèlement aux remarques, les règles linguistiques sont expliquées.

« Je t’apprends le français, bordel ! » est tellement hilarant qu’il devrait être remboursé par la Sécu !

Un exemple :

 

L’homme surnuméraire / Patrice Jean

Ce roman expose deux récits parallèles.

La famille Le Chenadec est un navire en plein naufrage. Serge, agent immobilier quinquagénaire, est contraint d’assumer le rôle du malheureux capitaine, impuissant face à l’indifférence des siens. Sa femme, visiblement lassée de sa vie de couple, l’efface de plus en plus de son quotidien et accumule les voyages dans l’espoir de rencontrer des personnes plus intéressantes que celui qui partage son domicile, ou plutôt qui l’encombre.  Quant à ses deux enfants, en pleine crise d’adolescence, Serge a l’impression d’être devenu un étranger à leurs yeux et comprend qu’à présent, il leur inspire davantage un sentiment de honte que d’affection.

Bref, Serge est devenu l’homme en trop de son propre foyer, un homme surnuméraire.

Clément, jeune homme passionné de littérature, enchaînant les soirées mondaines et universitaires, se voit proposer un contrat dans les éditions Langlois avec une mission particulière… Dans un monde où les conformités sont en perpétuel bouleversement, Clément est chargé de réécrire les grands classiques littéraires afin qu’ils soient mieux adaptés aux normes de l’époque.

Les deux hommes aux vies opposées vont, dans un contexte peu ordinaire, se rencontrer…

Patrice Jean examine les sentiments humains et les imperfections du monde contemporain avec profondeur. En prenant d’un côté un anti-héros contrarié par une vie en perte de saveurs et un jeune homme aux mœurs libres, l’auteur slalome entre désespoir et insouciance, décadence et divertissement, lassitude et dynamisme. En lisant ce roman, on pense énormément à Houellebecq et ses inquiétudes. Le ton est sérieux, parfois cynique mais le récit n’est pas dépourvu d’humour et de lucidité.

Je conseille L’homme surnuméraire aux amateurs de romans qui dépeignent leur époque, sans dimension moralisatrice mais à travers des personnages et des situations tout à fait vraisemblables.

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Seuls les enfants savent aimer / Cali

Le 7 janvier 1974 à Vernet-les-Bains, Mireille Calicuri, qui a succombé à une maladie, est enterrée. Son fils, Bruno, 6 ans, est interdit d’obsèques considéré trop petit pour supporter autant d’émotions et pour « comprendre ». Or, le petit garçon comprend et même très bien. Sa maman est partie, elle ne reviendra plus. Il ne lui reste que les souvenirs de son visage, ses caresses et les histoires qu’elle lui racontait tendrement. Bruno le sait, il devra traverser son enfance sans sa maman. Il tombera amoureux de Carol, sans pouvoir en parler avec sa maman. Il rencontrera un ami fidèle, Alec, qu’il ne présentera jamais à sa maman. Il se fera des bobos que sa maman ne pourra pas soigner.

Bien sûr, son papa, ses frères et sœurs sauront le choyer et partager des moments fabuleux avec lui. Bruno grandira, avancera, se trouvera des passions et prendra goût à la vie. Cependant, l’absence de sa maman partie trop tôt ne sera jamais compensée…

Dans son premier roman, Cali nous bouleverse en endossant le costume de Bruno, le petit garçon qu’il était à 6 ans. Bien que le chagrin donne le ton du livre, Seuls les enfants savent aimer résonne comme une ode à l’enfance, à la famille et à l’amour maternel. À l’instar du chanteur, l’auteur choisit les mots justes pour retranscrire les sentiments du petit garçon. Si les joies et les plaisirs de l’enfance sont présents, Cali semble ne se poser qu’une seule question depuis la mort de sa mère : c’est quand le bonheur ?

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Eléphant / Martin Suter

A Zurich, dans un grotte isolée, vit Schoch, un SDF indolent et profondément alcoolique. Un soir, tandis qu’il entame une énième phase de décuvage, Schoch aperçoit un petit animal qui ressemble étrangement à un minuscule éléphant rose fluorescent… Mais cette vision ne résulte ni des effets de l’alcool, ni d’un folie hallucinatoire ; l’éléphant est bel et bien réel. Épaulé par Valérie, une vétérinaire, et conscient que l’animal doit être recherché, le sans-abri fait tout pour protéger son nouveau compagnon. Ce qu’il ne sait pas en revanche c’est que le pachyderme miniature est le fruit d’une expérience scientifique et fait l’objet de convoitises multiples. Un docteur, un propriétaire de cirque, un dresseur d’éléphants et autres hommes d’affaires sont en effet sur les traces de l’éléphant.
Dans cette fable, Martin Suter greffe le monde de l’imaginaire au monde réel grâce au personnage de l’éléphant rose que nous aimons tant croire apercevoir après consommation abusive de diverses substances. Ceci est en fait un prétexte pour dénoncer les dérives de l’expérimentation scientifique et notamment en ce qui concerne l’exploitation animale. La soif du pouvoir, le désir de richesse, de possession et la barbarie sont ainsi  passés au peigne fin par l’auteur. Toutefois, la bienveillance spontanée de Schoch envers l’éléphant rose met à l’honneur les relations affectives et authentiques entre l’homme et l’animal et parvient à adoucir le récit.
Ce roman est étonnant, intriguant du début à la fin et surtout formidablement imaginé.

Ne dites pas à ma mère que je suis handicapée, elle me croit trapéziste dans un cirque / Charlotte de Vilmorin

Charlotte vit en fauteuil roulant depuis l’enfance. Elle travaille pour une agence de pub et tient un blog, « Wheelcome », dans lequel elle raconte sa vie de jeune femme active en fauteuil roulant. A travers ce récit, elle témoigne sur les difficultés d’assumer un handicap dans une société pas toujours adaptée. De son parcours scolaire compliqué au monde du travail, Charlotte évoque sans complexe les travers du quotidien. Une marche à franchir, un chemin trop étroit pour son fauteuil, le bouton de l’ascenseur trop haut placé… la jeune femme passe tout au peigne fin avec une grande humilité. Il est aussi question de ses relations sociales dans ce témoignage. Nous faisons la connaissance de ses chauffeurs personnels parfois loquaces, parfois inexpressifs, de Marie, sa « nounou » attentionnée, et de ses collègues parfois indélicats mais toujours bienveillants. Avec beaucoup de pudeur et de perspicacité, Charlotte de Vilmorin rapporte comment elle a appris à accepter sa situation plutôt que de la subir. Elle nous invite également à prendre la vie comme elle vient malgré ses défauts et ses injustices. Loin d’être une complainte, ce livre a tout du plaidoyer pour l’optimisme et le relativisme. Une lecture réjouissante et savoureuse.

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Les crayons de couleur / Jean-Gabriel Causse

Autant tout de suite vous annoncer la couleur : ce roman inédit nous révèle combien l’usage abusif du noir et blanc peut jouer sur notre moral et nous fait ainsi réfléchir sur l’importance de mettre de la couleur dans notre vie.

A cause d’un évènement inexplicable, toutes les couleurs disparaissent et l’humanité entière fait grise mine. Ajay, chauffeur de taxi à New York est impuissant face à la perte de teinte de son véhicule et ça le rend vert. Une ancienne chef étoilée broie du noir en voyant les fruits désormais grisâtres perdre de leur saveur. En un mot, tout n’est pas rose dans ce nouveau monde… Pourtant, deux protagonistes refusent de voir rouge et tentent d’élucider ce mystère : Arthur, employé dans une fabrique de crayons de couleurs, et Charlotte, bien qu’aveugle de naissance, spécialiste de la couleur et chroniqueuse sur France Inter. Epaulés par Louise, une fillette un peu fleur bleue, ils se retrouvent dans une chasse à la couleur face à un gang de malfaiteurs chinois.

Cette histoire amuse autant qu’elle impose une nouvelle perception de notre monde. En refermant le livre on se rend compte que notre quotidien serait bien triste sur fond gris et on se précipite dans son placard pour trouver le pull jaune canari et le pantalon rouge vif qui dormaient depuis trop longtemps sous les piles de vêtements noirs ou gris. Le scénario n’est qu’un prétexte car le récit est bel et bien un éloge des couleurs. Ce roman ravira les amateurs de peintures et de dessins notamment.

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